Lune s'était rendue sur l'île Sud, avait annoncé sa venue et avait patiemment attendu sur les plages colorées. Elle n'avait pas voulu s'aventurer au sein du territoire pour ne pas compromettre son plan. Elle espérait passer un accord de neutralité avec Solaris, l'impitoyable dominant de ces terres.
La Reine n'avait pas touché au moindre brin d'herbe, pas bu la plus petite goutte d'eau: elle n'était pas chez elle et elle craignait que tout acte joue en sa défaveur. Soudainement, une odeur ténue mais connue l'avait intriguée et, en relevant la tête, elle avait vu arriver l'étalon couleur de soleil. Dire qu'il portait le même nom que sa soeur alors qu'ils étaient si différents.
Elle s'était redressée, se tenant très fièrement, seule mais avec un aplomb redoutable. Quand Solaris avait été à sa hauteur, elle l'avait salué d'un ample mouvement de l'encolure.
"Salutations Solaris. Je suis venue ici en paix pour discuter. M'accordes-tu un peu de ton temps ?"
Pas de vouvoiement, seulement quelques polies tournures de phrases. Il n'aimait pas les Vagabonds, elle n'aimait pas chez lui ce qu'elle jugeait être de l'arrogance.
Solaris gardait un air impartial, malgré l'éclat d'agacement miroitant dans ses prunelles. Aussitôt la sentinelle avait annoncé l'arrivée de la Reine que le Dominant s'était précipité à sa rencontre, désagréablement surpris par la nouvelle. « — Lune. » D'un sec hochement de tête, il avait salué la jument qu'il écoutait sans interrompre, tout de même curieux de savoir ce qu'elle lui voulait.
Et ses sourcils se froncèrent vaguement à l'énoncée de ses intentions ; discuter, mais à quel sujet ? « Nous avons déjà discuter, me semble-t-il. » Il tira ses oreilles vers son encolure, soutenant le regard glacé de la vagabonde. « Je t'avais dit que les vagabonds seraient laissées en paix tant qu'ils resteraient hors de notre vue. » Quand il s'agissait de dire les choses, Solaris n'avait jamais tourné autour du pot, à la joie des uns et à l'horreur des autres. Au moins, il ne gaspillait le temps de personne. « Alors que fais-tu sur nos plages, Reine ? »